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Sujet d’oral de philosophie

 

Liberté naturelle et liberté civile

 

            La question de la liberté correspond à une problématique universelle transcendant toutes les époques et tous les lieux. La question de la liberté en effet spécifiquement humain et se pose plus particulièrement dans le cadre de la société civile. Puisqu’on a coutume a consacré l’opposition entre liberté civile et liberté naturelle, il convient d’examiner en quoi ces libertés sont différentes et si l’on peut les penser autrement que dans un rapport antithétique. La liberté civile retreint-elle la liberté naturelle ?

 

I)                    Liberté naturelle est pensée comme accomplissement d’actes sans entraves

 

            Dans la philosophie du XVIIIème siècle, on retrouve chez les grands penseurs de l’époque, la thématique de la liberté naturelle dans un contexte d’emprise de l’institution cléricale.

             Ainsi, Voltaire montre que le jugement objectif et libre du huron dans L’ingénu vaut mieux que celui des hommes victimes du système qui les a endoctrinés. Le huron pose les bonnes questions et met en évidence dans la contradiction des croyants. Une telle attitude est possible du fait de la liberté naturelle dont le huron a bénéficié. Grâce à elle, le huron n’a pas de préjugés au contraire des catholiques de la société civile.

            Rousseau dans son Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes, met en évidence le bonheur des hommes primitifs qui n’ont pas à subir les contraintes de la société civile mais jouissent pleinement de la liberté naturelle. Il semble donc que la liberté naturelle correspond à la vraie liberté car à l’état naturel, l’homme n’a pas de limite à son pouvoir d’action conformément à la conception qu’a Hobbes de la liberté.

 

            Or comment concevoir que la liberté naturelle corresponde à la véritable liberté dans laquelle l’homme s’accomplirait si comme le dit Aristote, « L’homme est un animal politique » c’est-à-dire que sa réalisation en tant qu’homme ne peut se faire que dans la société ?

 

II) La liberté civile accomplissement de l’homme

 

            En partant du présupposé que la liberté consiste en un pouvoir d’action illimité, une erreur est peut-être commise. En effet, la liberté correspond à un concept moral. Si l’on dit que les animaux vivent en liberté, on ne saurait affirmer que les animaux sont libres dans la mesure où la liberté suppose une conscience morale. Or la conscience morale suppose la distinction entre le bien et le mal.

            De plus, la liberté se réalise dans le cadre d’une vie en communauté, car un homme seul est comme une bête (cf. Aristote). En effet, un tel homme est voué à ses pulsions c’est-à-dire à une altérité. En effet, tel un animal les forces naturelles le dominent et c’est le règne de la nature qui prévaut. Pour qu’il y ait liberté, il faut que l’homme ait l’autonomie de la volonté comme le suggère Kant. La liberté civile suppose des obligations d’où son nom d’aspect dialectique. Ce n’est pas le fait de donner libre cours à ses pulsions qui fait la liberté.

            Même Rousseau dit dans Le contrat social : « L’impulsion du seul appétit est esclavage mais l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté ». La liberté suppose ainsi, une loi reconnue par la société civile. Il y a autonomie de la volonté dès lors qu’il y a choix moral.

            La vie humaine n’est vraiment respectée que par des lois empêchant que l’homme soit un loup pour l’homme. Donc la liberté civile suppose un Etat.

 

III) La dialectique de la liberté civile

 

            Le devoir est donc une composante fondamentale de la liberté civile. Car dans la liberté naturelle, l’homme n’a en fait ni droit ni devoir à proprement parler. Il n’y a en effet aucune loi permettant ou interdisant.

            La liberté civile nécessite la loi et donc l’obligation. Dans la liberté naturelle, l’homme peut être soumis potentiellement à n’importe quel contrainte, la contrainte étant caractérisée par le fait que celui qui y est soumis ne peut faire autrement que d’obéir. A cet effet, agir sous le menace d’une arme à feu relève de la contrainte et non de l’obligation. Or la liberté civile diffère de la liberté naturelle car l’obligation ou le devoir est moral et vise le bien. L’obligation ne s’impose pas de façon irrésistible. En principe, la loi vise le bien de la société mais suppose de limiter la liberté naturelle des individus.

            Ainsi, la différence entre obligation et contrainte est fondamentale dans la compréhension de la dialectique de la liberté civile. C’est en renonçant à sa liberté naturelle, qu’on est vraiment libre dans la société c’est-à-dire qu’on s’acquitte d’un devoir moral et du choix de la législation.

 

 

            La liberté civile correspond à un dépassement de la liberté naturelle ; elle constitue un stade supérieur où l’homme s’accomplit vraiment dans la société civile en tant qu’être moral tel que Rousseau la conçoit dans Le contrat social. En effet, l’homme n’est plus soumis à la nature mais choisit véritablement en participant à l’organisation de la cité (polis). La liberté civile, c’est la liberté du citoyen.

 

Cyrille GODONOU

Khâgne B/L (2ème année de classe préparatoire de lettres et sciences sociales)

1998