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Sujet : Volatilité des marchés et stabilité
de la sphère réelle
Sujet proche donnée à l’ENA en 1997 : Les marchés financiers sont-ils source
d’efficience économique ?
Introduction
La mondialisation et son cortège de déréglementation donne naissance à un vaste marché international des capitaux. Les agents économiques se rencontrent sur les marchés financiers pour assurer le financement de l’économie réelle. Tandis que les uns apportent des capitaux en échange de plus-values potentielles, les autres les reçoivent pour répondre à leurs besoins financiers.
Cette connexion entre sphère réelle et monétaire devrait donc se traduire par une même évolution des deux sphères. En effet, la valeur boursière d’une entreprise est censée traduire ses performances. Il n’y aurait donc aucune raison qu’une évolution des cours lui soit favorable dès lors que ses résultats économiques révèlent sa mauvaise posture.
Nonobstant cette analyse a priori, force est de constater les spéculations massives et récurrentes. Ce sont surtout les krachs retentissants dont elles sont accompagnées qui inquiètent. Or dans le même temps, l'économie réelle semble stable. Effectivement, les taux de croissance sont réguliers et l'inflation reste modérée dans les pays de la zone euro. Cette instabilité des marchés concomitante d’une économie réelle stable a bien eu lieu en 1987 et 1998 en France. La réalité des faits contredit ainsi l’analyse a priori d’une évolution parallèle des deux sphères.
Pour
autant, la bourse ne peut cependant durablement prospérer dans une économie
réelle en panne. Inversement, la situation sur les marchés financiers finit par
peser sur la conjoncture économique. Dès lors, l’analyse des causes et des
effets de cette relation complexe est nécessaire.
Deux thèses s’affrontent. La première invoque la déconnexion des sphères financières et réelle pour expliquer la coexistence d'une volatilité des marchés et d'une stabilité de l'économie. En dépit de cette déconnexion voire en raison de cette déconnexion, les marchés volatiles seraient néfastes. La seconde plaide en faveur d’un lien entre économie réelle et économie financière. Cette seconde thèse assure que l’économie réelle bénéficie de conséquences positives grâce aux marchés volatiles.
I- Une déconnexion totale et nuisible
A- Une déconnexion de la sphère financière et de
la sphère réelle
1- Pour expliquer cette
déconnexion, plusieurs facteurs imputables aux acteurs peuvent être invoqués.
Tout d’abord, l’avidité ne tient pas compte des données fondamentales de
l’économie réelle puisqu’il s’agit d’empocher une plus-value à court terme. Le
principe même de la spéculation tient peu compte des effets réels. Ensuite, la
crainte générée par la spéculation entraîne des comportements moutonniers.
Enfin, l’interprétation des informations économiques apparaît lacunaire voire
irrationnel. L’incompétence en matière d’analyse économique explique ainsi
cette déconnexion. Phases d’euphorie et de dépression se succèdent donc.
2- D’autres éléments confirment et aggravent les évolutions divergentes entre économie réelle et marchés financiers. En premier lieu, l'importance des flux capitaux est sans commune mesure avec les échanges de l'économie réelle. Ces derniers sont cent fois moindres que les flux transitant par les marchés financiers. En second lieu, les marchés dérivés sur lesquels des intermédiaires financiers interviennent, évoluent en fonction des marchés financiers. Ils assurent à ces intermédiaires une rente d’autant plus lucrative que l’amplitude des variations de cours est importante.
B- Une instabilité nocive et contagieuse de l'économie réelle.
1- Au lieu de limiter les risques de taux ou les risques de change pour lesquels ils ont été conçus, les marchés à terme servent en fait à la spéculation. Ce dévoiement renforce le mal qu’il était censé faire disparaître. Le risque d’une crise majeure plane sur les marchés à terme. L'éclatement des bulles spéculatives a des effets néfastes sur l'économie réelle. Primo, les crises financières affectent la solvabilité des établissements financiers qui ont alimenté la hausse. Secundo, leur capacité à financer d'autres agents est limitée. Tercio, une prise en charge publique des pertes intervenues résultent souvent des crises financières.
2- Ce fonctionnement
autonome des marchés dépossède les Etats de leurs prérogatives et crée le sentiment
que leur politique économique est prise en otages par les marchés financiers.
Véritable menace pour des gouvernants tenus pour responsables de la situation
économique, correctif brutal en cas de politique économique qui leur est
défavorable, les agents des marchés financiers iraient ainsi à l’encontre des
intérêts de l’économie réelle.
Certes le propre des bulles spéculatives est d’éloigner les cours de leurs
valeurs fondamentales. Pour autant, il convient de déterminer si les variations
de cours sont au centre même de l'économie réelle qui pourrait au cas échéant y
trouver un avantage.
Il- Une volatilité financière liée à la sphère réelle et avantageuse
A Un lien certain entre les deux sphères en dépit des logiques différentes
1 – Les marchés financiers doivent faire face au problème difficile de l’incertitude. Pour ce faire des anticipations sont nécessaires. Même en suivant de très près les indicateurs de l’économie réelle, il faut aussi tenir compte des réactions des autres acteurs. Ces interactions sont donc complexes. La réactivité des opérateurs financiers confère à l’économie financière un temps de réponse plus rapide que celui de l’économie réelle.
2- Les marchés financiers
sont mondialement plus intégrés que les économies réelles. Ainsi, la petite
taille du marché français le rend dépendant d’opérateurs internationaux. Des
capitaux d’outre-atlantique y sont présents, exerçant une forte incidence sur
les cours boursiers en raison de leur faible capitalisation. Du coup, les
évolutions boursières sont identiques contrairement à l’évolution des économies
réelles qui demeurent décalés.
C’est précisément cette
globalisation financière qui est responsable de l’euphorie boursière suivie du
krach en 1998. La crise asiatique de 1997 a révélé l’instabilité des marchés
des pays émergents. En réaction à ces troubles économiques, un déplacement des
capitaux vers l’Europe porteuse de meilleures perspectives s’est opéré. Cette
embellie a été suivie d’une correction somme toute relative.
B- Les marchés sont efficients parce que volatiles
1- Les marchés financiers reflètent les
tendances fondamentales de l’économie réelle et permettent d’en prévoir les
retournements. L'indétermination de court terme des marchés est le fondement
même de leur efficience. Le principe même de la spéculation assure l’efficience
des marchés.
2- Les États sont contraints d’être
aussi efficaces que les investisseurs privés. Les marchés scrutent leur budget
et leurs choix économiques. Obligés de s’adapter, les Etats sont tenus de faire
des choix efficients.
Paradoxalement, les marchés concourent à la stabilité de l’économie réelle en
incitant les Etats à davantage de transparence et de choix rationnels et donc
prévisibles.
Conclusion
En somme, selon la thèse à laquelle on adhère il faudra ou non instaurer un
régulateur mondial des marchés.
Certes, il est envisageable de favoriser la coordination des autorités de surveillance des différentes places boursières. Cependant, il apparaît difficile de mettre en place une instance mondiale qui tiendrait en respect les marchés financiers.
GODONOU Cyrille
Licence en sciences économiques
2005